mardi 11 août 2015

Opinion : Pour une politique intelligente

Depuis que le concept de Smart city permet de redonner un coup de jeune à la gestion publique, des villes intelligentes ne cessent de naître. L’Union européenne même cherche à atteindre, au travers de sa stratégie Europe 2020, une économie inclusive, durable et… intelligente.

Remy PAUTRAT, en 2009, dans la Revue d’intelligence économique, met en évidence que dans le contexte mouvant de la mondialisation et de l’accélération du monde, l’intervention de l’Etat apparait « inadaptée et indispensable ». Bref, l’entreprise devient « agile », le secteur public « intelligent ». On n’ose se demander comment l’une et l’autre agissait dans le passé. Comme l’auteur le souligne, l’intelligence « s’impose comme un aimant conceptuel et opérationnel autorisant la rénovation, la réorganisation des actions traditionnelles de l’État (…) ».
Quel programme cache cette opération de marketing politique (qui n’est pas pour une ville plus intelligente ?) ? Qu’est-ce qu’un territoire « intelligent » ? D’après GIFFENGER (et Wikipedia), une ville intelligente ressemble les aspects suivants : Une économie, un environnement, des habitants, un mode de vie et une administration… intelligents.

Par hasard, les grandes entreprises (Google, Bouygues, ErDF, Véolia, Engie…) ont lancé des campagnes de promotion des « smart city ». Leur idée est d’utiliser le Big data pour optimiser le fonctionnement des villes.  

Une lecture positive de cette vision « intelligente » de l’avenir implique de mettre la révolution numérique plus largement au service des citoyens ; c’est-à-dire aller encore plus loin que les smarts phone. In fine, les applications pratiques de l’informatique auront des retombées économiques, appelée l’économie intelligente. Vous connaissiez le paradoxe de Solow ? « On voit l’effet de l’informatique partout, sauf dans les statistiques de la productivité ». Et bien, c’est bel et bien fini ! En 2011, une étude d’Oxford[1] rappelait que les TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) représentaient 8% du PIB, 25 % de la croissance, 6% de l’emploi. Si d’ici 2020 (oh, quelle coïncidence), des efforts d’investissement dans les TIC étaient faits, 5 % de croissance en moyenne serait à la clé. Cette même étude précise néanmoins que l’apport des TIC dans l’économie doit être accompagné par une harmonisation de la réglementation sur les données personnelles. Premier caillou dans la chaussure. Le refus de Google à l’oubli numérique international s’apparente à un échec de l’Etat de protéger ses citoyens[2]. Plus de données, plus de rapidité, plus d’algorythmes signifient également plus d’intelligence des usagers. Cependant, comment ses derniers peuvent-ils gagner au jeu s’ils ne jouent pas ? Le débat reste ouvert.
Soit, l’intelligence n’est pas que numérique, d’une part parce que les TICs ne résolvent pas l’enjeu écologique à venir[3], d’autre part parce que l’Etat et les collectivités savent que nous sommes des humains, des êtres sociaux. Bref, l’intelligence c’est : numérique + économique + environnement + social. Le développement durable 2.0.

Question. Ce concept charrie-t-il une nouvelle révolution ? Les « villes intelligentes » sont des espaces où la gestion publique s’adapte à son temps. La particularité de cette nouvelle gestion publique est qu’elle implique souvent une démarche participative auprès des citoyens, intégrant largement les principes constitutionnels de la charte pour l’Environnement. De fait, cette démarche permet théorique une approche nouvelle, renouvelant les idées politiques. Une interrogation demeure : les citoyens, qui s’abstiennent de voter massivement lors des élections, sont-ils plus impliqués lors de démarches participatives ? Qui participe à ces appels au public ? 

Le moyen a un impact.  
Cette question mériterait une réflexion plus profonde que d’autres seront mieux à même de traiter.
Gunthers Anders, L'obsolescence de l'homme 
Jacques Ellul, L'ère technicienne


Autre question. La ville intelligente est-elle juste et équitable ? Nombre d’articles reprennent le concept de générations X, Y et Z qui seraient casi ontologiquement différentes eu égard à leur usage d’Internet : la Z représentant les ado d’aujourd’hui, les Y les jeunes adultes de 20-30 ans et les Z ceux qui ont 40-50aine. Les seniors ne sont pas concernés par cette catégorisation numérique de la population. Une politique qui met au centre de son fonctionnement l’usage des TICs va indubitablement renforcer une fracture numérique. Pour vous dire, mes grands-parents ne changent plus de chaîne depuis que la TV est uniquement sur décodeur numérique. Faut-il le rappeler, les petits vieux seront bientôt en majorité en France et bien des jeunes retraités d’aujourd’hui peinent à utiliser correctement les logiciels bureautiques. Cette rénovation de l’action publique devra, pour s’épanouir, se concentrer sur l’ergonomie et l’accompagnement des innovations.

Question finale. Pourquoi ne parle-t-on que des « smart city »[4], des villes intelligentes ? Où sont passés les campagnes ? Certes, les grands centres urbains rassemblent près de 85 % de la population et des emplois[5]. Faut-il rappeler que la plupart des territoires ruraux voient leurs services publics se réduire progressivement à peau de chagrin ? Les mairies, les écoles, les postes, les gares, les hôpitaux, les tribunaux, les magasins, les bars, les exploitations agricoles, les emplois ferment.  Le problème n’est-il pas posé à l’envers ? Plus la campagne est délaissées, plus les villes grossiront et devront être intelligentes pour gérer la fourmilière. A-t-on oublié le principe d’égalité ? le principe de péréquation ? Et si l’on concevait une ville et une campagne intelligentes ? Deux mondes qui se compléteraient l’un l’autre, une vraie politique intelligente.




[1] “L’impact des politiques publiques sur les TIC” dans « Le dividende des TIC : l’utilisation de la technologie pour augmenter la productivité et la croissance dans l’UE », Oxford Economics, 2011, p.29
[2] Référence à indiquer.
[3] Les data centers représentaient 1,5 % de la consommation mondiale d’électricité, soit la production de 30 centrales nucléaires. « Le cout énergétique d’Internet équivaut à 30 centrales nucléaire », in Slate, 26/11/2012
[4]
[5] « la ville grignotte les campagnes », in Le figaro, 19/10/2011

mercredi 29 juillet 2015

Méthode de lecture (1)


La méthode de la lecture est très simple. Lire est une plongée dans un nouveau monde fait de mots, certes, mais un autre monde.

Il est très important d'être au clair avec ses motivations en ouvrant la première page d'un livre. Que vous lisez "L'histoire de l'épopée des sardines" pour votre plaisir (quoi ? oui on peut aimer les poissons aussi), pour le travail (véridique, on se moque pas), ou pour planifier son futur road trip en bateau, votre attention sera TOTALEMENT différente et c'est normal. Les détails sur lesquels vous vous fixerez seront la résultante de votre objectif.

Un petit schéma pour vous expliquer simplement ma conception de la lecture.


Les trois méthodes sont correctes mais j'avoue avoir une nette préférence pour la troisième. C'est quand plus sympa de lire et de confronter le réel avec la fiction ! 






Editorial

"Seshat lit" est le premier blog qui va vous donner envie de lire et de repousser les limites de la lecture.

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